René & Magdeleine RAULET

La vie au village et à l’école , souvenirs et anecdotes
Réalisé le 23 juin 2005 par les Monfis


Mr RAULET a été instituteur à SAINT MARCEAU de 1948 à 1975 et sa femme Magdeleine de …… à 1977
Ils y prirent leur retraite après avoir fait construire la première « nouvelle » maison route de CHALANDRY, juste au-dessus du lavoir de Fontenelle.
Habitant le village depuis plus de 50 ans, instituteur, puis un temps secrétaire de mairie, conseiller municipal, observateur et acteur de la vie du village, M RAULET fait également œuvre d’historien, notamment du passé de SAINT-MARCEAU, et les souvenirs qu’il a accepté de partager avec nous sont donc très précieux.


Problème de l’eau :
Il fallait aller chercher l’eau au puits avec des seaux. 27 tours de manivelle étaient nécessaires pouvoir amorcer la pompe, ce qui explique que dès qu’une personne avait effectué cette opération, on entendait la manivelle grincer, toutes les femmes du quartier accouraient pour profiter de cette amorçage.
Il était donc nécessaire d’économiser l’eau ; un premier seau était réservé à l’eau de table (il n’y avait pas d’eau en bouteille) ou de cuisine, ce qui restait était mis dans un deuxième seau et servait pour le lavage des mains et enfin on gardait dans un troisième seau l’eau déjà légèrement souillée pour laver le sol.

M et Mme RAULET ont été les premiers à avoir l’eau sur l’évier : l’eau de pluie était recueillie à la gargouille et stockée dans une réserve de 1 m3, M RAULET installa ensuite une baignoire.

Certains enfants arrivaient à l’école, souvent en retard, avec les mains sales pour avoir déjà bien travaillé : ils devaient faire la vaisselle, aller vider le seau hygiénique au jardin, y conduire également les cendres de la cuisinière (du poêle) où on avait brûlé du bois ou du charbon. Quelque-fois, pour aller plus vite, un gamin jetait les cendres du haut de l’escalier de sa maison, provoquant un nuage qui salissait tout, lui le premier.Le charbon était livré par les GENNESSEAUX de Boulzicourt.

Les enfants avaient beaucoup de difficultés à se laver chez eux, aussi RR avait-il fait installer
2 pommes de douche au fond de la classe, lors de la rénovation de l’école, mais en attente de l’adduction d’eau !
Dans de nombreuses de maisons, il existait un évier alimenté par un seau ou un broc, l’eau s’écoulait directement à l’extérieur (sous la beuquette) sur le trottoir ou dans une cour. On s’y lavait les mains ou le visage, pour la grande toilette (hebdomadaire) on installait un baquet ou une bassine au milieu de la cuisine (il fallait un bon pour pouvoir se procurer cette bassine juste après la guerre).

Les commodités de l’école, servant aux élèves et aux instituteurs, se trouvaient à l’extérieur, contre le mur du château, elles donnaient non pas sur la cour mais directement sur la rue. Elles ont disparu mais RR en parle comme « d’un monument historique » qu’il aurait fallu conserver.
Il n y avait pas d’eau, et y mettre des seaux aurait conduit à remplir la fosse trop vite , la commune n’étant pas riche ne le souhaitait pas. Aussi la propreté des lieux était-elle douteuse. Il fallait y conduire les tout petits car fascinés par le trou, ils s’installaient à l’envers. D’autre part, la classe enfantine se trouvait au 1er étage et les petits ne pouvaient attendre. il fallait descendre les escaliers, passer dans la rue, …et comme il n’y avait pas de femme de service, l’institutrice ne pouvait être à la fois dans la rue et dans sa classe.
Le même problème se posait pour les plus grands qui y allaient seuls alors qi’ils devaient passer par la rue, mais les retenir pendant la classe pouvait provoquer des « inondations ». Heureusement il n’y avait pratiquement pas de voiture.

Les enfants avaient l’habitude de ce genre d’endroit car leur maison n’était équipée que d’une cabane au fond du jardin et aussi d’un « Jules » pour la nuit, seau hygiénique ou pot de chambre qu’on allait vider le matin de très bonne heure pour ne pas être vu des voisins.

Saint Marceau, sur le plan géologique, avait la particularité d’avoir des failles, que l’on appelait des « nailles ». Ces crevasses étaient parfois si grandes que des chevaux y tombaient et qu’on avait le plus grand mal à les y extraire. Elles descendaient parfois jusque la nappe phréatique.
Certains ménages, ayant une naille dans leur jardin, avaient trouvé astucieux d’installer leur cabane au dessus et résolvait du coup le problème de l’évacuation. Heureusement il n’y a jamais eu de problème de contamination de la nappe (car on buvait l’eau du puits).
Pour les autres, la « tinette » était vider sur le jardin en guise d’engrais.

Certaines personnes, Alice et Juliette par exemple, allaient chercher l’eau à boire à la fontaine, persuadées qu’elle y était meilleure, et même après l’adduction d’eau, en ayant l’eau sur l’évier, elles ont continué à le faire.

Anecdotes sur la mairie :
Aussitôt la guerre (en 1948), avec les dommages de guerre, il a été proposé à la commune d’installer l’eau. Des études ont été menées mais le conseil municipal n’a pas accepté. Parmi les projets étudiés, il y en avait un qui se proposait de capter l’eau à la fontaine, le géologue M WATERLOO, estimait que le projet était suffisant pour une commune de 250 habitants.

Le refus du conseil municipal était dû au coût. La commune a toujours tiré le diable par la queue car elle n’avait pratiquement pas de ressources : elle louait les sarres mais à de petites gens, donc très bon marché et il n’y avait pas encore de taxe professionnelle qu’aurait acquittée l’usine du bas de la côte.
En 1948, M RAULET, en tant que secrétaire de mairie, a établi le budget, et il manquait 60 000F pour équilibrer les dépenses. Même en se creusant la cervelle on ne trouvait pas de solution, on avait même pensé mettre une taxe sur les chiens ! ! ! ! mais ça n’apportait rien. C’est la préfecture, par une subvention de 60 000F, qui a permis d’équilibrer ce budget.
Le maire était à cette époque M ROLLAND et sa fille, SOLANGE, avait tenu le secrétariat avant l’arrivée du nouvel instituteur.
Les dommages de guerre devaient être comptabilisés hors budget, on effectuait les dépenses (pour l’école, pour la mairie..etc..) et on demandait à être remboursé aussitôt. Or à Saint Marceau, on avait omis de réclamer les remboursements, ce qui faisait que la commune s’enfonçait dans un énorme déficit, à la grande joie du percepteur qui était au plus mal avec le maire et qui laissait la commune et son maire s’enliser.
Le nouveau secrétaire de mairie remédia à cet état de fait et la situation financière fut rétablie. Le maire en fut contrarié et en pleine séance du conseil, déclara que le secrétaire en faisait trop et voulait certainement prendre sa place ! RR lui donna aussitôt sa démission et ne revint pas à la séance suivante malgré les sollicitations du maire.
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