Mme Monique HUREAUX

Evocation de la vie d’autrefois à Saint-Marceau
Réalisé le 22 Mars 2005 par les Monfis


Née en 1930, Mme HUREAUX a des souvenirs qui commencent à être précis à partir des années 1935 et 1936. Nous nous sommes donc attachés à évoquer avec elle la vie au village, de cette période à la fin des années 50 ou au début des années 60.
Note : Nous avons par ailleurs davantage de témoignages à partir des années 60, et nous savons tous que les façons de vivre ont évolué significativement à partir de cette période : arrivée de l’eau, des tracteurs, des voitures, des télévisions ……
 
 
Mme HUREAUX a vécu pratiquement toute son enfance dans ce qui est actuellement le chemin des Sarts. Elle se souvient avoir quitté en 1936 la maison BELOTTI, rue Basse, où vivait sa famille, pour venir habiter la maison LEBAS, avec pour voisins, les LEBAS (l’Etoupette), maison mitoyenne au sud, Hermance FAGOT au nord, et en face, Charles PARIS à droite et Eugénie GRAFTIAUX à gauche.
 
C’est également en 1936 qu’elle intégra l’école, dans la classe de Mme TROYON (classe des petits). Elle retrouva la même institutrice en 1941, au retour de l’exode, mais cette fois dans la classe des grands.Elle se souvient que, pendant les bombardements par les alliés de la gare de Boulzicourt ou du dépôt de Mohon, la maîtresse emmenait les enfants se réfugier au bois Ninette. Les bombardements semblaient très proches, une bombe est quand-même tombée dans la pâture DEHUT, au-dessus de la fontaine.
 
La vie n’était pas facile dans les années 35 à 40, et encore moins pendant la guerre et juste après. On ne mangeait pas de viande tous les jours, mais, contrairement aux citadins, beaucoup de gens au village élevaient des lapins et quelquefois des poules, et presque tout le monde cultivait un jardin pour se procurer des légumes et des pommes de terre. Les agriculteurs échangeaient quelquefois un petit lopin de terre à jardiner contre un travail à la ferme (binage des betteraves, liage des gerbes et dressage des cavaliers à la moisson, …).
L’électricité était installée au village avant guerre, mais n’était utilisée dans la plupart des foyers que pour la lumière et, petit à petit, pour quelques postes de radio.
Le chauffage se faisait presqu’essentiellement au bois, qu’on brûlait dans la cuisinière de la cuisine. C’était le seul élément de chauffage de la maison. Il fallait aller ramasser le bois mort et aussi couper des arbres dans les forêts avoisinantes, le débardage se faisant souvent à la brouette et le rapatriement des bûches sur les chariots tirés par des chevaux.
La réserve de bois était une corvée à laquelle chacun devait s’astreindre, comme celle de l’approvisionnement en eau. La famille Croizier allait remplir ses seaux au puits en haut de la côte (à côté de la petite entrée du château), mais Mme HUREAUX se souvient d’une période où, ce puits et celui de l’école étant inutilisables (pourquoi ?), une grande partie du village devait aller s’approvisionner à la fontaine.
 
Les femmes restaient à la maison et s’occupaient pendant la journée, entre autres, de ces tâches, que les hommes, qui travaillaient à l’extérieur, la plupart chez LEFORT en bas de la côte, reprenaient le soir après leur journée. 
 
Pour une petite fille de cette époque, les corvées ne semblent pas avoir été trop pénibles. Elle pouvait après l’école jouer à la poupée ou à la dînette. Bien sûr, on devait aller chercher le lait chaque jour à la ferme (chez RONDEAUX, chez PONCELET …) et sûrement aussi aller faire quelques courses, à la boulangerie CHAIRON ouverte jusqu’à la guerre, ou à l’épicerie tenue, place de l’école, par Mme ROLAND (mère de Solange POULL).
Pour d’autres courses, les gens allaient à pied à Boulzicourt, à Mohon, et on prenait le train à La Francheville pour aller à Charleville.
 
Les hommes, pour se distraire, avaient le choix entre le café LAPORTE qui faisait, outre le bureau de tabac, un peu d’épicerie, le café ROUSSEAUX avec son jeu de quilles le long du mur du château, le café LONGUET et son jeu de quilles accoté à la menuiserie, la ferme CAMUS à Constantine qui faisait café et jeu de quilles et était aux beaux jours le but des promenades dominicales.
Le village organisait 2 fêtes patronales chaque année, en juin et en octobre. Les fêtes religieuses marquaient la vie du village, notamment la procession du 15 auôt.
 
Le curé VINCENT a résidé à SAINT-MARCEAU, au presbytère, jusque dans les années 50, il a même fait venir ses parents avant la guerre.
 
Enfin, le travail au village était dominé par l’agriculture, avec des exploitations familiales utilisant souvent un ou plusieurs commis, telles les fermes du château , SPELLMANS et DEHUT, les exploitations des COURTEVILLE, PONCELET, RONDEAUX, CAMUS, GUICHART, ….
Les cafés représentaient souvent un travail secondaire, d’appoint, comme pour les CAMUS (ferme), les LONGUET (menuiserie), les ROUSSEAUX (menuisier aux chemins de fer à LUMES) .
La plupart des ouvriers travaillaient chez LEFORT, mais quelques uns allaient à MOHON ou à CHARLEVILLE.
Le château, enfin, était source d’emplois, puisqu’il occupait à plein temps un concierge et un jardinier et que des femmes du village travaillaient au ménage ou à la cuisine quand les châtelains étaient présents.
Il y avait peu d’artisans ou de travailleurs à domicile, mais on peut noter le caractère particulier du travail de Mme Georgette LAMOTTE, qui était couturière à domicile et qui, sur commande, allait travailler chez les gens en apportant sa machine à coudre.
 
En conclusion, il ressort que SAINT-MARCEAU, avant-guerre et même après, était un village typiquement rural, malgré l’usine LEFORT située en dehors du village. La population n’y était pas très riche, peu de gens possédaient un vélo et, apparemment, il n’y avait, en 1939, que 3 voitures : la camionnette de Mr LONGUET, la traction de Mr DEHUT et la 202 de Mr TROYON.
 
 
Annexes :
 
Pour mémoire, on notera que la famille CROIZIER partit en exode en mai 40, comme beaucoup de familles de SAINT-MARCEAU. Une erreur d’aiguillage les emmena, non pas en Vendée, mais en Bretagne. Ils en revinrent en juillet 41. Entre temps, Mr Emile CROIZIER fut fait prisonnier mais réussit à s’échapper avant d’être envoyé en Allemagne. Il parvint à rejoindre sa famille en Bretagne et travailla dans des fermes avant le retour au pays. Ayant repris son travail chez LEFORT, il fut envoyé, avec d’autres ouvriers de l’usine, en 1943, en Allemagne dans le cadre du STO. Venu en permission en 1944, il ne repartit pas et dut se cacher jusqu’à la libération.
 
 
 
Autre anecdote recueillie : en 1961, deux ouvriers armés de pelles et de pioches, arrivèrent, seuls, un matin, sur la place du Mont, pour commencer les travaux du futur château d’eau . Mme HUREAUX, les voyant devant sa porte, leur dit que le château était prévu un peu plus loin sur la gauche. Les ouvriers ne firent aucune difficulté pour se déplacer d’une dizaine de mètres ; les plans devaient être très précis ! ! !
 
Précision : il y a bien eu à SAINT-MARCEAU une boulangerie MACHUROT, mais elle était située rue de Constantine et Mme HUREAUX ne l’a pas connue, c’était bien antérieure.

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